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Les chroniques de Froissart 
 
 
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Grandeur et impertinence

 
Il n'est nul besoin d'être de gauche ni de figurer parmi les détracteurs du contrat première embauche (CPE) pour en venir à la conclusion que la méthode de Dominique de Villepin - le passage en force - est la plus mauvaise qui soit. Il suffit de se référer aux engagements du gouvernement précédent, dont l'actuel premier ministre était membre, qui ont été consignés dans la loi relative au dialogue social de mai 2004.  
 
"Le gouvernement prend l'engagement solennel de renvoyer à la négociation nationale interprofessionnelle toute réforme de nature législative relative au droit du travail. (...) Il saisira officiellement les partenaires sociaux, avant l'élaboration de tout projet de loi portant réforme du droit du travail, afin de savoir s'ils souhaitent engager un processus de négociation sur le sujet évoqué par le gouvernement", assurait cette loi. L'engagement était de bon sens. Et, arrivant à Matignon, M. de Villepin, s'est empressé d'y souscrire, déplorant que "les pratiques actuelles" de discussions entre le gouvernement et les partenaires sociaux soient "trop souvent sources d'incompréhension mutuelle". 
Alors pourquoi, ensuite, avoir renié cette promesse ? Pourquoi avoir lancé le CPE sans écouter les mises en garde des ministres "sociaux" du gouvernement, dont Jean-Louis Borloo ? Pourquoi l'avoir fait adopter à la hussarde par le Parlement, en urgence et à coup de 49-3 ? Pourquoi n'avoir jamais pris langue avec les syndicats, pas même les plus ouverts au dialogue, comme la CFDT ? Aujourd'hui enfin, après les fortes manifestations de samedi, pourquoi s'entêter et faire la sourde oreille face à la colère ou l'incompréhension d'une partie significative de la jeunesse et du monde salarié ? 
A toutes ces interrogations, on devine qu'il n'y a en réalité qu'une seule vraie réponse. Alors que la sagesse commanderait d'engager enfin une réelle concertation sur l'emploi des jeunes, M. de Villepin veut montrer qu'il n'est pas homme à flancher. En bref, ce n'est pas l'emploi qui commande. Mais, bien davantage, la compétition avec Nicolas Sarkozy pour apparaître comme le chef de file de la droite, un an avant l'élection présidentielle. 
Inquiétant aveuglement ! Car nul n'a intérêt à un durcissement du conflit social. Qui ne comprend les risques de dérapages ou de surenchères de cette épreuve de force ? Si le premier ministre n'a pas la sagesse de le mesurer, il revient au chef de l'Etat d'imposer, enfin, le dialogue social. Trop d'incompréhensions se sont accumulées de part et d'autre pour sortir de l'impasse sans un geste fort : l'annulation ou la suspension de la réforme. En s'y refusant, Dominique de Villepin espère l'emporter à l'usure. C'est un pari irresponsable, tant il creuserait, davantage encore, la fracture sociale et, désormais, générationnelle qui mine la France.  
Article paru dans l'édition du 21.03.06 
 

(c) Patryck FROISSART - Créé à l'aide de Populus.
Modifié en dernier lieu le 21.03.2006
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